On pouvait apercevoir ses longues jambes quelques mètres plus loin, perchée sur ses chaussures à talons neuve, la jeune femme attends avec impatience que son tour arrive. Elle tient un petit sac à la main et tire un peu sur sa jupe qu’elle juge tout de même un peu trop courte. Son débardeur lui ne dévoile pas encore sa poitrine naissante. Elle n’a que 14 ans mais déjà elle sait ce qu’elle veut faire de vie, elle veut la vivre dans la mode et si sa meilleure amie ne lui avait pas demandé de faire ce casting avec elle, elle n’aurait sans doute jamais pu en faire partie. Lorsqu’une voix féminine sévère s’élève dans la petite salle d’attente, le cœur de la jeune femme rate un battement et, d’une manière qui se veut confiante, elle se dirige vers la femme austère. Celle-ci lui désigne alors la porte qu’elle devra franchir et l’adolescente la franchit sans une once d’hésitation. C’est peut être pour ça qu’elle fut prise finalement dans cette grande agence connue, parce qu’elle avait cet air hautain sur le visage, cet air que la plupart des photographes et des créateurs s’arracheront quelques années plus tard.

La jeune femme marche dans cette longue rue, vêtue de bien peu de chose en cette soirée estivale, elle espère que marcher lui arrachera la douleur. Alors elle continue, elle se met a marcher de plus en plus vite, tellement vite qu’elle se surprend à courir. Alors elle continue, elle continue a courir, sentant ses larmes perler doucement aux coins de ses yeux, elle les ferme aussi fort qu’elle peut, ne s’arrête que quelques secondes le temps de balancer les chaussures à talons qu’elle porte et continuer, encore plus loin, encore plus vite. Elle court jusqu'à ce qu’elle n’en puisse plus et s’effondre au beau milieu d’un champs. Et là elle se laisse aller, elle éclate en sanglots. Sa plus grande raison de vivre vient de la quitter, comment pourra-t-elle continuer sans elle ? Sa meilleure amie est morte il y a de cela quelques heures. Tuée lors d’un accident de voiture, enfin de voiture… La jeune femme traversait la route et un automobiliste l’a fauchée. C’est à peu près a partir de ce moment-là que tout à changer. Seweryn ne voyait plus le monde comme il l’avait toujours été pour elle mais comme le tas d’humus en décomposition qu’il était. A nos vies de merde dans ce monde de merde qui tire à sa fin.

Je sniff et le rail de coke me brule un instant le nez, c’est la toute première fois que je prends de la coke, mais pas la première fois que je me drogue. Je ne suis pas dépendante, je ne pense pas l’être mais le stress lié à mon métier, et cette vie de merde me donnent envie de passer au niveau supérieur. Je ne suis plus que l’ombre de moi-même, j’aime toujours la mode mais j’ai de plus en plus l’impression de faire office de porte manteau. Pourtant je marche avec grâce sur mes talons dont la hauteur en ferait frémir certains. Je n’ai pas peur de ce monde de chacal, parce que j’en suis une moi aussi. Soit tu es un loup, soit tu es un agneau. Je ne me laisserai pas mangée toute crue. La fête bat son plein mais déjà elle se termine, je me sens me faire soulevée du fauteuil où je comate, doucement, par un jeune homme. Je passe un bras autour de ses épaules et lui souris, il me demande alors où j’habite et je lui désigne mon appartement. Il me ramène mais il ne se passe rien, je suis tellement bad que je m’endors dès que mon corps touche le lit.

Le lendemain matin, il est toujours là. Je me lève difficilement de mon lit et vais prendre un peu d’eau (un litre entier) pour faire passer la gueule de bois. « Qu’est ce que tu fou encore là. » le jeune homme lève la tête de sa tasse de café et me souris, un sourire que je n’oublierai jamais tellement il me fait fondre « Je voulais m’assurer que tu sois bel et bien en vie ». Je ris doucement et m’approche de lui, je m’assied sans aucune gène sur ses genoux, à califourchon « Je le suis. Qui es-tu donc ? », il passe une main sur ma cuisse nue, laissant filer ses doigts le longs de ma colonne vertébrale, remontant doucement dans ma nuque avant de cesser tout contact. « Alessandro. Je suis déçu, tu ne m’as pas reconnu. », je plisse les yeux en le regardant mais non, rien ne me vient. Plus tard j’apprendrai que c’est lui qui m’a initié à ce monde de débauche il y a un an. Une soirée mémorable. Je m’approche un peu plus du jeune homme, posant mes mains sur son torse vêtu d’une chemise, je m’amuse alors à défaire un bouton, puis un deuxième. « Si tu étais un si bon coup que ça, je devrais vite recouvrer la mémoire… » dis-je alors, le jeune homme éclate de rire avant de, lui aussi, agir de ses deux mains.

Quelques jours, quelques semaines ont passées avant que je commence à réellement me méfier d’Alessandro. Le fait est que je commençais à l’apprécier de plus en plus et que je n’en avais pas envie. Il y a quelques années lorsque j’avais vu les dégâts que peuvent provoquer l’amour, j’avais décider que ça ne m’arriverais jamais, mais depuis quand les sentiments sont contrôlables ? Nous étions tout les deux dans le lit, encore épuisés de nos récent ébats dans mes draps, j’avais posé ma tête sur son torse, lui fumait une cigarette et tandis que je passai un doigt sur son torse, je me soulevai un peu pour le regarder, je posai alors mes lèvres sur les siennes, l’embrassant fougueusement avant de me mettre sur lui, a califourchon. Et ces quelques mots sortirent tout seul « Je t’aime… » immédiatement j’ouvris de grand yeux, déjà je regrettais mes mots et Alessandro m’attrapa par les hanches, me déposant le moins délicatement du monde sur le lit à coté de lui, il se leva, n’écrasa même pas sa cigarette qu’il laissa dans le cendrier, il se rhabilla aussi vite qu’il pu et sortit sans un mot de la pièce. Je restai quelques instants sur le lit, à genoux, complètement nue mais peut importe, j’étais seule de tout façon. Je passai une main dans mes cheveux tandis que les larmes me brulaient les yeux sans vouloir franchir la barrière de mes paupières jusqu'à ce que j’en sentis une atterrir sur mon genoux.

J’étais une pure idiote, je le savais en plus qu’il ne fallait pas croire en cette idiotie qu’est l’amour. Je ne vivais plus que pour mon métier et mes sortie, je ne l’ai plus croisé et tant mieux, j’essayais au mieux de l’éviter, si je savais où il allait, je n’y allais pas. Ca aurait été plus simple si monsieur n’était pas devenu mannequin lui aussi.